CONFERENCE DENIS GIELEN

Ce mardi 08 décembre 2013. Denis Gielen viendra faire une présentation du travail de l’artiste TONY OURSLER à 10H30 à l’auditoire du carré des arts. Bienvenue à tous les étudiants et professeurs d’ARTS2.

AFFICHE-DENIS-GIELEN-2013-2

Tony Oursler appartient à une génération d’artistes américains dont l’influence s’est ressentie sur la scène européenne dès la fin des années 1980. Aux États-Unis, dans un contexte marqué par les débats liés aux prolongements du formalisme (l’art post-minimal et l’art conceptuel) et leurs alternatives postmodernistes (le retour à la peinture des années 1980), des artistes réinvestissent le domaine de la performance. Cette pratique s’était fondée dans les années 1960 sur la pluridisciplinarité, le recours au corps comme vecteur d’une transgression libératrice et enfin sur la critique des institutions.
Les artistes de Fluxus ou du body art, Nam June Paik le premier, mais aussi Bruce Nauman ou Vito Acconci, conservaient de leurs actions de simples traces documentaires, devenues progressivement des œuvres à part entière ; les artistes de la nouvelle génération, comme Chris Burden par exemple, empruntent au cinéma et à la télévision de véritables procédures de mise en scène, et travaillent directement et plastiquement leurs enregistrements. Ces « traces » génèrent à leur tour des fictions, où le recours à la narration n’est pas dissociable d’une réflexion sur le statut de la représentation. Et, sur fond de crise de la société post-industrielle, certains de ces artistes mettent l’accent sur une valorisation de la culture populaire, engageant ainsi une critique de la culture de masse et de ses implications idéologiques.

Dans « l’art vidéo », terme qui recouvre des pratiques très hétérogènes, Tony Oursler est avant tout celui qui a profondément modifié le champ et la définition des installations vidéo, en faisant appel à une forme de théâtralisation. Il a recours à une grande variété de médiums — vidéo, film, photographie, informatique, web, sculpture, objets, mais aussi bandes musicales et sonores qui font l’objet d’un travail spécifique. Il a très tôt étendu la conception de l’écran à des supports inusités, de l’architecture et de l’espace public aux mannequins de chiffons — les dummies, ou « poupées », qui apparaissent en 1992 —, animés de visages, de pupilles exorbitées, de bouches déversant des flots de paroles. Il peut parfois utiliser des arbres ou des fumées pour disperser — plus qu’il ne les projette — des images vidéo (The Influence Machine, 2000-2002).
Enfin, le plus souvent ses installations intègrent le matériel de projection, et le cadre même où elles sont exposées : le dialogue de Tony Oursler avec l’architecture est devenu une constante dans son œuvre.Ce principe d’intégration concerne également les monologues et les dialogues de ses bandes son. Elles sont constituées de textes et d’emprunts, comme dans le procédé du cut-up de la Beat Generation, ou plutôt du sampling — terme utilisé par les musiciens pour le mixage d’échantillons de morceaux existants. Comparable à l’image vidéo dont l’artiste manipule le degré de fluidité, cette parole coule et se répand dans l’espace à la manière d’une matière organique. Enfin c’est le spectateur qui est « intégré » aux installations : les dummies s’adressent à lui, mais il est également attendu dans certains points de l’espace où il accède aux commandes d’une partie de l’œuvre, dont il devient en retour l’instrument.

Tony Oursler/dispositifs/Jeu de Paume